Se libérer de ses addictions

L’addiction est un processus dans lequel est réalisé un comportement qui peut avoir pour fonction de procurer du plaisir et de soulager un malaise intérieur. Ce comportement se caractérise par l’échec répété de son contrôle et par sa persistance, ceci en dépit des conséquences négatives (Goodman, 1990).

1. Les deux types d’addictions

On distingue deux types d’addictions : l’addiction à une substance et l’addiction comportementale.

C’est l’objet d’addiction lui-même qui permet de différencier ces deux types d’addictions.

1.1 L’addiction à une substance

Addiction à une substance : elle concerne les personnes présentant une consommation de type abus ou dépendance à une ou plusieurs substances psychoactives: alcools, opiacés, stimulants.

On parle également de toxicomanie ou de pharmacodépendance.

Les objets de dépendance peuvent être repartis en différents groupes :

  • Les substances licites : alcool, tabac, médicaments psychoactifs (antidépresseurs)
  • Les substances licites détournées de leur usage : poppers, inhalants et solvants, Kétamine, GHB/GBL, médicaments détournés
  • Les substances hallucinogènes : cannabis, champignons hallucinogenes, LSD
  • Les psychostimulants : caféine, cocaïne, amphétamines, ecstasy, MDMA méphédrone, krokodil…
  • Les opiacés : codéine, morphine, héroïne…

1.2 L’addiction comportementale

Addiction comportementale : elle concerne les personnes présentant une addiction à une pratique. Appelée parfois addiction sans drogue, ce type d’addiction se caractérise par le recours à un médiateur qui n’a pas de propriétés psychoactives (jouer, acheter, travailler, faire du sport…).

On parle également de conduite addictive ou de toxicomanie « sans drogue ».

Les addictions comportementales peuvent porter sur les pratiques suivantes :

  • Le jeu pathologique : Jeux d’argent et vidéos (DSM)
  • La cyberdépendance : médias électroniques, internet, smartphone (nomophobie), réseaux sociaux, séries…
  • Le sport : bigorexie ou sportoolisme
  • Les troubles du comportement alimentaire (TCA) : anorexie mentale, boulimie nerveuse, orthorexie
  • L’hyperactivité professionnelle : Ergomanie, Workhaholism ou Boulomanie
  • Les achats compulsifs
  • la dépendance affective
  • l’hyperactivité sexuelle

Actuellement, seuls les troubles associés aux jeux d’argent sont inscrits dans le DSM V.

Les autres addictions comportementales ne sont pas, à ce jour, considérés comme d’authentiques addictions car on ne dispose pas de données scientifiques convaincantes.

Dans le cas de véritables addictions comportementales, qui supposent entre autres une dépendance, des similitudes avec les addictions aux substances sont manifestes: répétition de la conduite, plaisir, manque, soulagement, mécanismes biologiques communs, souffrance, tentatives d’arrêt infructueuses (cf. Critères de Goodman ci-dessous).

2. Fonctionnement physiologique des addictions

Du point de vue neurobiologique, les recherches dans le domaine des addictions ont mis en lumière le rôle fondamental des neurones dopaminergiques dans la génèse des addictions. En effet, la cocaïne, l’ecstasy, le tabac, l’alcool, les médicaments psychoactifs ont en commun une propriété : ils augmentent la quantité de dopamine dans notre cerveau.

La dopamine est un neuromédiateur du plaisir et de la récompense, que le cerveau libère lors d’une expérience qu’il juge « agréable ». 

Chaque plaisir ressenti (beauté, musique, plaisir sexuel, exercice physique, repas riche enmatières grasses) est associé à des poussées de dopamine.

C’est ce réseau dopaminergique, très utile pour l’apprentissage de ce qui est bon ou mauvais pour l’organisme, qui peut provoquer des dépendances : les drogues usurperaient le circuit de la récompense qui sert habituellement à la motivation et non au plaisir.

Les drogues ou substances psychoactives peuvent agir sur des neuromédiateurs produits naturellement par l’organisme (la dopamine, la sérotonine, l’acétylcholine…) selon trois modes d’action :

1) certaines substances imitent les neuromédiateurs naturels et donc se substituent à eux dans les récepteurs : la morphine, par exemple, s’installe dans les récepteurs à endorphine, et la nicotine, dans les récepteurs à acétylcholine.

2) certaines substances augmentent la sécrétion d’un neuromédiateur naturel ; la cocaïne, par exemple, augmente la présence de dopamine dans la synapse, et l’ecstasy celle de la sérotonine et de la dopamine.

3) certaines substances bloquent un neuromédiateur naturel ; par exemple, l’alcool bloque les récepteurs nommés NMDA.

Lorsque la quantité de dopamine augmente dans les structures cérébrales, quelle qu’en soit la raison, nous ressentons du plaisir et considérons que tout va bien, même si par ailleurs notre corps souffre ou que nous sommes déprimés.

Ainsi les drogues, par leur action biochimique, modifient la conscience que nous avons de notre environnement et de nous-mêmes.

La prise répétée de drogues modifie à long terme la façon dont notre cerveau perçoit l’origine de ses satisfactions et perturbe notre recherche du plaisir, entraînant des phénomènes de dépendance.

En ce qui concerne les addictions comportementales, le fonctionnement physiologique serait similaire. Une étude de Weinstein et Lejoyeux (2010) a montré des modifications dans le fonctionnement du circuit de la récompense chez les patients incapables de contrôler leur consommation de jeux vidéo et d’Internet : les chercheurs ont constaté une altération de la taille du striatum ventral et une forte augmentation de l’activité des neurones dopaminergiques.

3. Critères pour le diagnostic des troubles addictifs

Pour qu’une addiction soit considérée comme une maladie, il faut que les critères diagnostiques présents soient à l’origine d’une souffrance personnelle ou d’une altération importante de son fonctionnement social dans la vie quotidienne.

En ce qui concerne l’addiction aux substances, d’après le DSM V (Diagnostic and statistical manual of mental disorders),  les critères diagnostiques d’addiction aux opioïdes sont les suivants :

Une liste de critères élaborée par le psychiatre américain Aviel Goodman (1990) permet de faire la part des choses entre excès passager et addiction comportementale. Ces critères sont les suivants : 

4. Comment se libérer des addictions?

La prise en charge d’une addiction est multidisciplinaire : elle repose le plus souvent sur un suivi médical (avec parfois un traitement médicamenteux), une prise en charge psychologique individuelle et/ou collective, un accompagnement social, voire parfois un suivi diététique (cas des addictions aux substances et des troubles du comportement alimentaire).

Le succès dépend essentiellement de la motivation de l’individu à se sevrer, puis de l’amélioration durable de ses conditions de vie et de son estime de lui : trouver un emploi, mener des activités, avoir des centres d’intérêt, trouver un rôle et une utilité dans la vie sociale.

Pour se libérer des addictions ou réduire la probabilité de développer un problème d’addiction, il existe des « facteurs de protection ». Il s’agit de :

  • Stimuler sa capacité d’adaptation au stress et aux difficultés personnelles, développer ses ressources internes : capacités à résoudre les problèmes, s’adapter aux situations, savoir demander de l’aide, savoir gérer ses émotions. Voir les articles : Faire face au stress: les stratégies de coping, Comprendre nos émotions et La Communication non Violente
  • Bénéficier d’un encouragement du milieu familial (attachement parent-enfant, soutien, reconnaissance) et avoir un « réseau de soutien » à l’extérieur de sa famille (amis, collègues)
  • Désapprendre ce que l’on a appris : être capable de s’affirmer, de se libérer des drivers, des schémas transgénérationnels et de lâcher prise
  • Etre optimiste ! Avoir un but dans la vie et l’espoir en l’avenir, avoir le sentiment de pouvoir contrôler sa propre vie
  • Développer une bonne estime de soi

L’alimentation peut permettre d’accompagner le sevrage et/ou réduire les conséquences négatives générées par la consommation de certaines substances (carences alimentaires, troubles digestifs, troubles du sommeil…).

Voici une série de fiches-conseils réalisées par des diététiciens-nutritionnistes:  

SOURCES :

  • Goodman, A. (1990). Addiction: definition and implications, British Journal of Addiction, 85, 1403-1408.
  • Pedinielli, J.-L, Rouan, G, Bertagne, P. (1997).  Psychopathologie des addictions, Paris : Puf.
  • Varescon, I. (2009). Les addictions comportementales : définitions, évolution du concept et questions. In Isabelle Varescon, Les addictions comportementales, pages 11-18. Editions Mardaga.
  • Weinstein A, Lejoyeux M. (2010). Internet addiction or excessive internet use, The American Journal of Drug and Alcohol Abuse, 2010 Sep; 36(5): 277-83.

Articles sur Internet : 

  • Addictions (2009). Site de l’INSERM – Institut National de la Santé Et de la Recherche Médicale : lien ici.
  • Inserm (dir.). Conduites addictives chez les adolescents – Usages, prévention et accompagnement : Principaux constats et recommandations. Paris : Les éditions Inserm, 2014, IX-77 p. – (Expertise collective). Lien ici.

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