L’impact de la pollution sur notre bien-être

La pollution atmosphérique n’altère pas seulement la santé physique (asthme, allergies, maladies pulmonaires…), elle a également un impact sur les émotions et le bien-être psychologique.

Dans une première partie sont présentées les études montrant l’impact de la pollution atmosphérique sur notre humeur.

Dans une deuxième partie sont présentés les nouveaux troubles psychologiques liées aux angoisses vis-à-vis des problématiques environnementales: les anxiétés écologiques.

Enfin, des pistes d’actions individuelles pour lutter contre la pollution de l’air sont présentées dans une dernière partie.

1. L’impact de la pollution atmosphérique sur l’humeur

En analysant les messages postés sur l’équivalent chinois de Twitter, des chercheurs chinois (Zheng et al, 2019) ont observé que l’humeur se dégrade les jours de pic de pollution.

Zheng et al. (2019) ont analysé le contenu sémantique de 210 millions de tweets et ont mesuré la concentration de particules fines* engendrées par les usines, les centrales à charbon et le trafic automobile dans 144 grandes villes chinoises. Ils ont ainsi observé que l’humeur des habitants varie en fonction des pics d’exposition aux particules fines:

Chaque hausse du taux de particules fines dans l’air est associée à une baisse de moral sur les réseaux sociaux. 

De la même façon, une étude conduite à Londres par des chercheurs du King’s College (Roberts et al., 2019) a établit un lien entre troubles psychologiques à l’adolescence et pollution de l’environnement.

Cette étude a été réalisée auprès de 284 enfants londoniens à 12 ans et 18 ans :

  • à 12 ans, leur niveau d’exposition à deux principaux polluants atmosphériques était estimé par rapport à leur domicile (particules fines et dioxyde d’azote)
  • à 12 ans et 18 ans étaient mesurés les symptômes de la dépression, de l’anxiété, des troubles de l’attention et de l’hyperactivité

Afin d’écarter un maximum de biais, les chercheurs ont tenu compte d’autres facteurs pouvant expliquer la survenue de dépression chez les adolescents suivis, notamment le fait d’avoir été victime de violence pendant son enfance ou d’avoir des antécédents familiaux de troubles psychiatriques.

Les résultats de cette étude montrent que les enfants qui grandissent dans un environnement particulièrement pollué ont trois à quatre fois plus de risques de développer un trouble dépressif majeur à l’âge de 18 ans.

Pour le docteur Helen L. Fisher, auteure de l’article, ces résultats ne sont pas une surprise: « les particules fines traversent la barrière hémato-encéphalique et causent une inflammation dans le cerveau. Il existe donc un lien biologique probable entre la pollution atmosphérique et la dépression ».

Le risque de depression pourrait également être accru par les nuisances sonores. D’après le docteur Helen L. Fisher : « un bruit excessif peut être stressant et perturber le sommeil, deux facteurs qui ont été associés à un risque accru de dépression ».

2. les anxiétés écologiques

Les catastrophes écologiques de ces dernières décennies (marées noires, catastrophes nucléaires, nuages toxiques, dérèglements climatiques, catastrophes climatiques: canicules, sécheresses, cyclones…) ont contribué à une prise de conscience environnementale individuelle, collective et gouvernementale.

Réduire notre empreinte écologique en modifiant nos pratiques quotidiennes permettrait de protéger notre environnement tout en contribuant à développer notre bien-être eudémonique, c’est à dire notre épanouissement à travers une vie qui a du sens (voir l’article sur La croissance post-traumatique).

En effet, la préservation de l’environnement peut nous permettre de :

  • Nous décentrer de nous-même en nous donnant le sentiment de participer et de contribuer à quelque chose de plus vaste qui nous dépasse (prendre soin de la nature et de notre planète)
  • Développer une forme d’altruisme vis-à-vis des générations futures, on parle d’altruisme intergénérationnel (préserver la planète pour les générations à venir)
  • Augmenter notre estime de nous et le respect que nous nous accordons par le respect que nous accordons à notre planète et à la nature à laquelle nous appartenons (interdépendance entre la nature et nous)

Toutefois, la sensibilité aux questions environnementales peut devenir une réelle source de souffrance psychique, de stress et d’angoisses pour certains individus: on parle d’anxiétés écologiques ou éco-anxiété.

L’écopsychologie est le champ de la psychologie qui s’intéresse à la relation entre les humains et la nature, elle s’appuie sur les travaux développés dans les domaines de la psychologie, de la philosophie, de l’écologie et de l’anthropologie (Roszak, 1992).

Plusieurs termes existent pour définir les angoisses liées aux problématiques environnementales:

1. L’éco-anxiété

L’éco-anxiété désigne ce que les individus ressentent lorsqu’ils se sentent constamment rappelés aux problèmes associés aux dérèglements écologiques et climatiques et aux incertitudes face à l’avenir.

Ces états anxieux peuvent s’organiser sous forme de peurs phobiques ou obsessionnels.

D’après le psychiatre François Chauchot (Véronique, 2019), l’éco-anxiété est caractérisée par les comportements suivants :

  • être très préoccupé à l’idée du réchauffement climatique et de ses dangers : sentiment d’impuissance face à une catastrophe qui semble venir inexorablement
  • se rendre personnellement responsable du réchauffement climatique: obsession autour de l’impact écologique de ses actes, culpabilité d’avoir contribué (ou de contribuer) au dérèglement des écosystèmes
  • développer des comportements d’évitement (éco-paralysie, voir ci-dessous)

L’éco-anxiété se manifesterait par de la colère, de la peur, des troubles du sommeiltroubles de l’humeur, des troubles musculo-squelettiques, des crises d’angoisse voire de la dépression.

L’éco-anxiété pourrait aggraver d’autres problèmes liés au stress comme la prise de substances addictives, l’anxiété et la dépression (Lorenzo, 2019).

Par ailleurs, l’éco-anxiété serait responsable de l’apparition de troubles obsessionnels compulsifs, notamment chez les enfants (d’après Elizabeth Haase, psychiatre; Lorenzo, 2019).

2. L’éco-paralysie

L’éco-paralysie: sentiment de ne pas être capable de faire des choses concrètes pour atténuer les risques liés au changement climatique (sentiment d’impuissance face au changement climatique).

Pour certains individus, l’éco-anxiété serait si forte qu’elle les empêcherait d’agir: elle générerait une paralysie face aux enjeux environnementaux. Selon Glenn Albrecht, ces individus ressentiraient une forte apathie face à l’environnement, ils auraient le sentiment qu’ils ne peuvent rien faire qui serait suffisant.

L’éco-paralysie serait provoquée par la surabondance d’informations et la désinformation sur les changements climatiques (éco-confusion).

Les autres raisons qui peuvent motiver les individus à ne pas réagir à la menace climatique sont: le déni, la perception lointaine du risque, la méfiance à l’égard des médias et des gouvernements, l’accès à l’éducation et à l’information (Paré, 2015).

3. La solastalgie

La solastalgie**: Etat d’impuissance et de détresse profonde causé par le bouleversement d’un écosystème (terme inventé en 2007 par Glenn Albretch, philosophe de l’environnement).

Cet état de nostalgie ou mélancolie est un sentiment de désolation profond vécu par des individus qui souffrent des mutations de leur habitat, de la dégradation et/ou de la transformation de leur milieu de vie (d’après Glenn Albretch, interviewé par Paré, 2015).

4. Comment limiter les anxiétés écologiques?

Pour limiter l’anxiété liée aux problématiques écologiques, il faut lutter contre le sentiment d’impuissance en se concentrant sur ce que nous pouvons contrôler et en agissant en conséquence: il s’agit de transformer nos pensées anxieuses en actions concrètes (voir partie 3 de cet article: Comment lutter contre la pollution de l’air ?).

Nous ne pouvons pas agir à la place des autres, mais nous pouvons nous concentrer sur ce qui est à notre portée. L’éco-anxiété peut être vue comme une étape vers l’éco-responsabilité.

Par ailleurs, il est parfois nécessaire de se couper des sites et chaines d’information qui aggravent les angoisses (névrose médiatique).

3. Comment lutter contre la pollution de l’air ?

Nous contribuons tous aux émissions atmosphériques de polluants par les transports, le chauffage des bâtiments, l’agriculture, l’industrie et la production d’énergie.

Chacun d’entre nous peut modifier ses pratiques du quotidien afin de protéger notre environnement, notre santé et notre futur en réduisant notre empreinte écologique, c’est à dire la pression que nous exerçons sur la nature.

Voici une liste d’éco-gestes à pratiquer au quotidien:

1. Les transports

  • Prendre soin de son véhicule: une voiture mal réglée (filtre à air, vidange, galeries…) pollue jusqu’à 50 fois plus qu’une voiture bien réglée. Faire réviser son véhicule permet de faire des économies et de limiter les émissions polluantes.
  • Minimiser l’utilisation de la voiture: 
    • Choisir le moyen de transport le plus adapté à ses déplacements (à pied, en vélo, en transport en commun; 40% des déplacements font moins de 2 km)
    • Penser au covoiturage : partager son véhicule permet de faire des économies en partageant les frais de carburant
    • Regrouper ses courses en un seul voyage 
    • Organiser des téléconférences pour réduire les déplacements, pratiquer le télétravail quelques jours par semaine
  • Modifier ses pratiques de conduite:
    • Couper le moteur lors des arrêts prolongés (économie de carburant, réduction du bruit et de la pollution)
    • Rouler doucement les premiers kilomètres car les systèmes antipollution (pots catalytiques) ne sont efficaces que lorsque le moteur est chaud
    • Adopter une conduite souple et économique (surconsommation de 30 à 40 % avec une conduite brusque ou trop rapide)
    • Ne pas abuser de la climatisation (surconsommation de carburant allant jusqu’à 25%)

2. La maison

  • Éteindre les lumières lorsqu’on quitte une pièce, utiliser des ampoules basse consommation
  • Eviter l’usage de produits à base de solvants (peinture à l’huile, essence, térébenthine, pesticides et autres). Les jeter à la déchetterie
  • Éteindre les appareils électriques lorsqu’ils ne sont pas utilisés
  • Opter pour le tri sélectif
  • Opter pour l’énergie végétale et le bois
  • Privilégier les protections solaires extérieurs (stores en façade, pergola, haie…) pour garder son logement frais l’été
  • Bien isoler, ventiler et aérer son habitation
  • Faire attention à sa consommation d’eau au quotidien: fermer les robinets, arroser ses plantes à l’eau de pluie
  • Ne pas brûler de déchets à l’air libre, même les déchets verts (jardinage raisonnée, broyage des végétaux pour du compostage, paillage, déchetterie)

3. L’éco-consommation

  • Réduire le gaspillage alimentaire
    • Planifier ses courses, faire une liste
    • Bien doser les proportions en cuisinant
    • Cuisiner les restes ou les congeler
    • Organiser son frigo par dates de péremption
    • Consommer en vrac pour n’acheter que les quantités nécessaires
    • Composter ses déchets alimentaires
    • Eviter le suremballage
    • Manger des fruits et légumes de saison
    • Modérer sa consommation de viande et poisson (produits à fort impact environnemental)
    • Consommer local (filières courtes)
  • Contribuer à l’économie circulaire:
    • Réduire le gaspillage vestimentaire (recycler, donner ou vendre ses vêtements)
    • Acheter et revendre des objets et meubles d’occasion
    • Préférer les produits recyclés
    • Faire réparer les équipements endommagés
    • Développer la consommation collaborative: partage, échange, troc ou location de biens entre particuliers
  • Limiter la surconsommation de produits numériques :
    • Eviter de multiplier les appareils, les entretenir, les recycler
    • Limiter son temps sur les écrans
    • Trier et supprimer ses données, les stocker en local (disque dur et non sur le cloud)
Merci à Anastasia, Alexandre, Jonathan et Baptiste, étudiants en Bachelor en Gestion et Valorisation Naturelle (BGVN) pour leurs idées en matière d’éco-gestes!

* Les particules fines sont des particules dont le diamètre est inférieur à 2,5 micromètres.

** Solastalgia signifie « être privé de l’essence même de son environnement ».
Contraction de « solace » [réconfort en anglais] et algie [douleur].

SOURCES :

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